photo_atelier_citoyen_toulouse.jpg

« Vos données personnelles au cœur de votre santé »
Riches, engagés, constructifs, avisés et plein de bon sens, les workshops de Toulouse ont lancé cette séquence avec enthousiasme et créativité, merci à tous les participant(e)s pour leurs contributions.

Déroulé

D’une durée de deux heures trente, le premier Atelier Citoyen du Numérique en Santé portant sur les données personnelles de santé, a réuni 50 personnes aux profils très variés représentatifs de la société française à Toulouse le 1er octobre. Deux séances plénières de 30’ et 45’, initiale et finale, ont encadré 4 tables rondes en parallèle de 12 personnes et de 1H15.
45 personnes se sont connectées à la plateforme numérique utilisée pour animer les débats. 

BD

Principaux enseignements 

  • On constate qu’aujourd’hui, les données personnelles de santé n’ont pas forcément un statut clair. Elles paraissent dispersées chez de multiples acteurs et leur statut exact n’est pas évident pour tous (« Sont-elles à moi ? »). L’accès aux données personnelles de santé via le digital apparaît dès lors comme une opportunité pour le patient de reprendre le pouvoir sur les données qui émanent de lui.
    Cette réappropriation de ces données (« Un carnet de santé amélioré où je pourrais trouver mes antécédents familiaux comme mon génome ») est immédiatement vue comme le gage d’une meilleure prise en charge et d’un meilleur suivi, cette efficacité nouvelle étant liée à la centralisation dans l’espace numérique des data. L’usage de ces données est d’ailleurs fortement associé au mobile (« une fiche médicale hors connexion accessible en urgence sur mon smartphone »).
     
  • Très vite les citoyens, usagers du système de santé et patients, définissent des conditions d’usage en se situant clairement au centre du dispositif qu’ils imaginent.

    §
  • Ainsi, la gestion des droits d’accès à leurs données, leur paraît être une prérogative importante, qui prend la forme d’une gestion des droits fine, concernant les contenus (« on peut masquer telle pathologie et pas telle autre ») et les parties prenantes, y compris les différents acteurs de santé qui n’ont pas a priori accès à tout même s’ils jouissent d’un statut spécifique.
    Ces droits d’accès aux données peuvent être modulés par l’urgence (« Accès à tout dans le service d’urgence ») ou par la possibilité de donner procuration à un tiers. Cet enjeu de l’accès, de la protection du patient et de son rôle central est majeur. Il dessine un patient « au centre », actif dans son parcours de santé, maître de ses données, ce qui peut aller jusqu’à un « droit de retrait ». 

Verbatim :

« On part du patient à la base », « Nous patients sommes centraux », « Le patient à un rôle d’unicité, un rôle central », « Maîtriser l’accès à mes données », « Un contrôle personnel d’accès via les SMS pour indiquer si on est d’accord pour que tel praticien puisse accéder à ces données », « C’est au patient d’autoriser l’accès à ses données », « Hiérarchiser le niveau d’accès des intervenants ».

VC

  • Cependant, ce désir d’occuper le centre du dispositif n’exclut pas la question de l’accessibilité. Les citoyens s’interrogent sur la façon de traiter ces informations, quelquefois techniques, de les hiérarchiser, de leur donner sens (« Comment on filtre, comment on évite d’être enseveli par l’information ? », « Trop de data tue la data »).  Apparaît donc corollairement le rôle très important d’un tiers expert (médecin traitant, mais aussi pharmacien) qui permet de mieux comprendre et s’approprier ces données par son rôle de facilitateur, de passeur, de médiateur, qui coordonne et permet au patient de devenir véritablement proactif. Se dessine donc un binôme central patient / médecin traitant pour l’usage optimum de ces données.
     
  • À côté de l’accessibilité médicale, les citoyens sont aussi très sensibles à l’accessibilité numérique. La question des zones blanches, celle de « illectronisme » et de la non-maîtrise du numérique les interrogent. Ils soulignent donc l’importance de la pédagogie, de la notion d’accompagnement gradué pour aider à l’accessibilité de ces données : « Mettre en place de la pédagogie et des moyens pour assurer l’accessibilité au service », « Tous les patients ne sont pas égaux en matière d’accès au numérique », « Les mairies doivent aller vers les gens pour leur expliquer comment ça marche ». L’État est perçu comme jouant un rôle de garant en dernier recours dans la mise en place d’un nouveau dispositif d’accès aux données via le numérique, qui doit se faire sous forme d’une « transition douce », laissant la place à des solutions alternatives si nécessaire « pour ne laisser personne de côté : la ruralité, les anciens ».
     
  • Certains risques sont associés à l’innovation que constitue la e-santé, perçue globalement comme positive. Le digital peut appeler en effet l’image d’une médecine déshumanisée où l’on échangerait surtout avec des interfaces, qui renforcerait les déserts médicaux par le moyen du digital et qui conduirait à la disparition de la clinique. Dans cette hypothèse, le gain de rationalité se ferait au détriment de l’humain : « Le numérique ne doit pas supprimer l’humain », « Est-ce que je peux continuer à appeler le docteur pour un rendez-vous ou je dois passer par Doctolib ? ». L’idée est donc de « ne pas mettre en confrontation le numérique et l’humain, mais en complémentarité ». 
     
  • L’autre grande crainte est liée au risque de marchandisation, à l’idée que le partage commercial des données, avec les laboratoires par exemple, pourrait donner lieu à de la publicité, du ciblage lié aux pathologies, à une place prépondérante des acteurs économiques (vs acteurs de la santé). Cette crainte impose donc une « confidentialité absolue vis-à-vis des acteurs hors du soin », en particulier les mutuelles, les banques, les employeurs qui sont a priori construits comme apportant des données, mais n’y ayant pas accès. 
     
  • Le bénéfice majeur qui est immédiatement perçu, c’est la centralisation de ces données autour du patient qui permet un meilleur partage, une meilleure concertation des professionnels de santé pour le diagnostic, la cohérence dans les traitements. Cette mise en commun entre les différents praticiens est considérée comme un atout majeur : « Une connexion des tous les acteurs de la santé entre eux, que les informations puissent circuler entre toutes les parties prenantes de l’écosystème de la santé », « Meilleur partage, meilleure concertation », « Pour de pas être écartelé entre plusieurs praticiens », « Concentrer les données pour les partager entre praticiens ».
     
  • Les usagers du système de santé sont aussi sensibles à la mise en commun des données au niveau macro, dès lors qu’elles sont anonymisées, à la fois pour servir la recherche, la prévention, la gestion des crises sanitaires, mais aussi une meilleure allocation de moyens de santé et une meilleure gestion des ressources.
     
  • Enfin la concentration des données en un lieu appelle assez naturellement dans l’esprit des citoyens, une offre de services élargie, allant d’une base de connaissances certifiées ou d’un chatbot à des interlocuteurs capables d’interagir, d’orienter, voire de soigner (médecin) ou de traiter l’urgence en ligne. On passe ainsi facilement de l’idée de dossier, de données à celle d’un espace digital voire d’un portail de santé proposant des services comme la mise en contact ou la consultation en ligne.