Le développement de l’interopérabilité sémantique est une priorité pour la France
La délégation ministérielle au numérique en santé (DNS) a fixé le développement de l’interopérabilité dans les priorités de la feuille de route du numérique en santé. Cette politique passe notamment par le développement et la maintenance du cadre d’interopérabilité des systèmes d’information (CI-SIS), ainsi que la conduite de démarches sur son respect effectif par les acteurs du numérique en santé (mise à disposition d’outils de test, opposabilité réglementaire de certains volets prioritaires, conformité nécessaire pour bénéficier de divers financements ou accéder à certains services, etc.).
Un enjeu essentiel réside dans la partie ‘sémantique’ : quelles sont les terminologies standardisées et partagées qui doivent être utilisées pour décrire différents concepts de données (diagnostics, médicaments, examens de biologie médicale, etc.) ? Par exemple, si un acteur A transmet des données structurées à un acteur B, et que ces deux acteurs ne partagent pas les mêmes codes pour décrire un concept (ou que ces codes ne sont pas facilement traduisibles d’une terminologie à l’autre), l’acteur B sera en difficulté pour traiter correctement et automatiquement les données de santé qu’il aura reçues.
Une fois ces terminologies choisies et traduites en français, elles ont vocation à être intégrées dans les différents volets de contenu du CI-SIS, et être distribuées par le ‘centre de gestion des terminologies de santé’ (CGTS) géré par l’Agence du Numérique en Santé (ANS), notamment à travers le ‘serveur multi-terminologies’ (SMT).
La France a récemment choisi de s’engager vers la terminologie Systematized Nomenclature of Medicine Clinical Terms (SNOMED CT)3, dans la dynamique européenne, visant notamment à permettre la construction du futur espace européen des données de santé, axe stratégique de la présidence française du Conseil de l'Union européenne. Elle le fait avec le co-financement de l’Union Européenne et sous réserve de la bonne finalisation contractuelle et juridique des négociations en cours entre la France et l’association SNOMED International.
Si cette terminologie consiste maintenant en une option possible, un choix doit être fait pour chaque domaine pour tenir compte du niveau d’usage de l’existant chez les acteurs (ex: LOINC, CIM, etc.), et des éventuels choix qui auront été faits dans le cadre de la gouvernance de l’interopérabilité européenne, à laquelle la France contribue activement et qui devriendront opposables à la France en vertu du futur réglement sur l’espace européen des données de santé. Au vu des impacts pour les acteurs, et notamment les éditeurs et les PS, une concertation sera effectuée pour chaque choix important. À ce stade, trois concertations ont été lancées : une première sur la microbiologie, une deuxième sur les localisations anatomiques, et une troisième sur les terminologies de l’IPS (International Patient Summary).
Premier choix d’une longue série : la SNOMED CT pour décrire les localisations anatomiques
La description des localisations anatomiques est un élément particulièrement important, par exemple en imagerie médicale pour décrire les demandes, ou encore en biologie médicale pour décrire les sites où effectuer un prélèvement microbiologique. Elle est utilisée dans de nombreux volets du CI-SIS actuels ou futurs, comme la demande ou le compte-rendu d’imagerie, la prescription ou le compte-rendu de biologie médicale, le volet de synthèse médicale, la lettre de liaison, les mesures de santé, etc.
En l’absence de terminologie en fort usage et de préconisation européenne, une concertation a été lancée sur le choix à opérer entre deux terminologies identifiées comme les plus adaptées : la SNOMED CT et la FMA (Foundational Model of Anatomy). L’ANS a réalisé une étude préalable sur la SNOMED CT6 avec une analyse comparative avec la FMA des fonctionnalités proposées pour l’anatomie. Elle a aussi mis à disposition, sur la page de la concertation7, de documents permettant de décrire les avantages et inconvénients des deux alternatives proposées. Il apparaissait notamment que :
- La SNOMED CT (38 000 concepts sur les sites anatomique) est particulièrement intéressante comme terminologie multi-domaines (signes cliniques, maladies, organismes, procédures, etc.) favorisant ainsi l’expression de liens (ex: la maladie cancer du poumon a pour localisation anatomique poumon) ;
- La FMA (100 000 concepts environ) est particulièrement intéressante pour décrire de manière rigoureuse et formelle l'Anatomie en représentant des relations compositionnelles entre cellules, tissus, organes et région (ex : le lobe inférieur du poumon droit est partie de poumon droit localisé dans la région du thorax).
La concertation a rassemblé une quinzaine de contributions très riches de professionnels de santé et d’éditeurs, ou de leurs représentants. Elle a permis d’identifier les critères les plus importants pour les acteurs :
- La couverture et la granularité (> 80% des attentes), bien remplie par les deux terminologies ;
- L’usage dans un contexte de recherche ou d’interopérabilité à l’international (environ 75 % des attentes), pour lequel la SNOMED CT est mieux indiquée ;
- L’existence de passerelles inter-domaines (environ 70% des attentes), pour lequel la SNOMED CT est mieux indiquée ;
- Une représentation fidèle du domaine facilitant la navigation entre les différents niveaux région, organes et tissus (environ 65% des attentes), pour lequel la FMA est mieux indiquée.
L’analyse du déploiement actuel montre une certaine utilisation de la SNOMED CT, davantage dans des cas d’usage de recherche que dans le cadre du soin, et l’absence d’usage de la FMA.
65% des répondants de la consultation n'expriment pas de préférence marquée entre les deux terminologies, et 28% exprime une préférence pour SNOMED CT.
Suite à l’analyse de cette concertation, la puissance publique a décidé d’opter pour la terminologie SNOMED CT pour l’interopérabilité des données d’Anatomie, sous réserve de la finalisation des éléments contractuels avec SNOMED international.
Cette décision sera déclinée dans les volets CI-SIS concernés, dont certains sont utilisés dans les dossiers de référencements du programme Ségur Numérique. Par ailleurs, la terminologie, traduite en français, sera distribuée dans les meilleurs délais par le serveur multi-terminologies.