La bataille des usages est lancée
« Les outils et les tuyaux que nous sommes en train de construire ne marcheront pas si on ne gagne pas la bataille de l’usage » a souligné en ouverture, Thomas Fatôme, directeur général de la Caisse nationale d’Assurance Maladie et parrain de l’événement. A cet égard, il a rappelé l’importance du partenariat entre l’Assurance maladie, les Agences régionales de Santé et les Grades pour assurer dans les territoires une information et un accompagnement auprès de tous les acteurs et accélérer l’appropriation des usages.
Jacques Lucas, président de l’ANS, a, pour sa part, renchéri sur la nécessité de mobiliser les maires pour « aller vers » tous les publics et réaliser « un effort d’évangélisation » sur le numérique en santé. 17% de la population française est frappée d’illectronisme, a-t-il souligné, rappelant « à ne laisser personne au bord du chemin ». Le « scepticisme des Français » et l’« inertie » des professionnels de santé à s’engager pleinement dans un usage numérique des pratiques de santé est un fait, selon lui. Seules des solutions concrètes aux préoccupations exprimées par tous les publics permettront de lever les freins de l’appropriation des usages, « maillon faible de la route vers la e-santé ».
Une nouvelle feuille de route du numérique en santé
« Nous allons continuer avec les mêmes valeurs, la même méthode faite de petits pas, de transparence et de concertation et une égale ambition ». C’est en ces termes que le co-responsable de la Délégation ministérielle au numérique en santé (DNS), a planté le décor de la prochaine feuille de route du numérique en santé, dont l’élaboration vient d’être lancée avec l’Assurance maladie et l’Agence du Numérique en Santé.
Précisant la démarche, il a annoncé une concertation par cercles concentriques pour aboutir à une première version présentée lors du prochain Conseil du numérique en santé en décembre. Cette version fera l’objet d’une concertation élargie (acteurs de terrain, patients, professionnels et industriels) pour aboutir à une nouvelle feuille de route mi-avril 2023 avec une exigence : pérenniser la démarche de la précédente feuille de route, notamment en matière d’interopérabilité, de sécurité ou d’urbanisation.
Libérer la data tout en garantissant protection et confidentialité des données
En introduction, Thomas Fâtome et Jacques Lucas ont pointé l’enjeu crucial de la sécurité des données au regard du renforcement des menaces et de leur écho dans le grand public, dès lors qu’il s’agit de cyberattaques. Dans le prolongement de son intervention, la première table ronde a donc posé les défis de la comptabilité entre « la libération de la donnée » et la garantie de confidentialité pour les usagers. Frédéric Law-Dune, expert architecture et interopérabilité à l’ANS, a exposé l’action de l’Agence du Numérique en Santé pour sécuriser les données de santé. A cet effet, elle intervient à trois niveaux :
- par l’élaboration de référentiels de sécurité, rendus opposables en 2022,
- par le contrôle de la conformité des logiciels à ces référentiels,
- par l’assistance aux établissements de santé en matière de cyberattaque via le CERT Santé (prévention et résolution des incidents).
Il a également évoqué la révision de la certification des hébergeurs de données de santé qui fera l’objet prochainement d’une consultation et permettra de garantir une meilleure souveraineté des données.
Dans le cadre de cette table ronde, Emilie Passemard, directrice de projets à la DNS, a concentré son intervention sur les nouveaux moyens mis à disposition des usagers pour consentir ou non à la mise à disposition de leurs données de santé. « On donne la main à l’usager qui peut paramétrer son espace comme il le souhaite et décider qui accède à ses informations de santé ». Par ailleurs, il existe une traçabilité de la consultation de Mon espace santé. « Il faut créer une culture de la donnée de santé » a renchéri Arthur Dauphin, chargé de mission à France Assos Santé, précisant : « la question du consentement de l’usager doit rester un vrai choix ».
Accélérer les usages en santé numérique
La deuxième table ronde a permis de croiser les regards des professionnels de santé, des patients et des industriels sur l’accélération des usages en santé numérique.
Mon espace santé marque une étape décisive du développement de la santé numérique en France. Selon Paul Frappé, président du Collège de la Médecine Générale : « Mon espace santé est la partie visible de l’iceberg qui cristallise l’ensemble des actions du Ségur ». Pour permettre son adoption, il convient de « créer un réflexe collectif de l’accès au numérique en santé » a rappelé Garlann Nizon, cheffe de projet CAE Prisme. A cet effet, l’action des coordinateurs régionaux Mon espace santé et des acteurs de la médiation numérique, au plus près des usagers, a été jugée essentielle. Pierre De Bremond d’Ars, médecin généraliste, a considéré, pour sa part, que « l’usage viendra s’il est naturel, c’est par cette simplicité qu’on arrivera à ne pas exclure ».
Autre avancée majeure du Ségur : l’interopérabilité des logiciels entre médecine hospitalière et médecine de ville, saluée par les professionnels de santé. Ils ont relevé l’importance des nouvelles fonctionnalités numériques pour « simplifier la vie des praticiens et apporter du service aux patients ».
S’agissant des industriels, Pascal Becache, co-fondateur de Digital Pharma Lab et membre de Numeum, a fait part d’une satisfaction collective « car les services socles sont arrivés à grande vitesse ». Concluant cette table ronde, il a souligné la nécessité pour les industriels de « s’inscrire dans des initiatives collectives et concertées sur les territoires » avec tous les acteurs du numérique en santé.
La transformation numérique du secteur médico-social est en marche
La dernière table ronde a été consacrée à la transformation numérique du secteur médico-social. Odile Jamet, directrice de projets médico-social à la DNS, a témoigné du soutien politique que connait le secteur médico-social qui s’est traduit par un financement de 650 millions d’euros à travers deux programmes : le programme ESMS numérique et le programme SUN-ES. Elle a rappelé que si les résultats concrets de cette accélération ne sont pas encore visibles, une première solution logicielle avait été référencée conforme Ségur et 56 potentiellement éligibles.
Pour sa part, Marine Requillart, représentante du Collectif SI médico-social et social, a souligné la singularité du secteur qui se caractérise par une atomisation des acteurs. « L’état des troupes n’est pas le même [que dans le secteur sanitaire]. On s’inscrit dans des temporalités plus longues » qui nécessitent de définir, en fonction des communautés professionnelles les outils les plus adaptés aux besoins de publics fragiles.
En conclusion de cette table ronde, Didier Alain, Responsable du programme ESMS numérique à la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie, a partagé deux convictions fortes : « ce qui est bon pour le médico-social, est bon pour la société » et « ce qui est bon pour le numérique en médico-social est bon pour le numérique ».
Rassemblant pour la deuxième année consécutive l’ensemble des acteurs de la e santé, l’Agence du Numérique en Santé a joué un rôle clé : engager l’ensemble des parties prenantes à relever le défi de l’adoption des usages de la e-santé par tous, sur tous les territoires.
Catalyseur national des projets numériques en santé et accélérateur de leur déploiement, l’Agence du Numérique en Santé a confirmé son ambition : garantir à chaque citoyen, dans un cadre éthique intangible, un meilleur accès à la santé par le numérique et contribuer ainsi à une société plus inclusive.
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